Alors voilà, ma petite note de la semaine dernière sur le coût hallucinant d'un bilan orthophonique a fait pas mal réagir (pas ici, mais sur les réseaux sociaux, parce que oui, figure-toi, j'ai un réseau social, c'est fou).
Des réactions d'orthophonistes, bien sûr, mais aussi de tout plein de gens qui n'avaient visiblement pas idée du quotidien et du "coût de revient" de la pratique orthophonique. Les premièr-e-s ont surtout répondu "Ouf, j'me sens moins seul-e !", et les seconds plutôt des remarques oscillants entre "Sans déconner ? Mais je pensais que..." et "Ouais, ouais, c'est ça, faudrait vous plaindre en plus ?" (note que je pense que ces derniers n'ont pas du lire la note en entier, m'est avis qu'un bilan de compréhension du langage écrit s'impose, mbref...).Une consœur a posté sur facebook un diagramme de ses dépenses et revenus, et tout de suite c'est plus clair qu'un long discours, alors je me suis dit que j'allais en faire un aussi, tiens. Mais alors attention, quand je décide de faire un diagramme, je ne rigole pas : quitte à me déprimer en objectivant le faible pourcentage de ce que je me garde en poche par rapport à mes honoraires, autant le faire bien ! J'ai sorti mes bilans comptables de ces 3 dernières années, et j'ai tout bien mis dans un chouette tableau excel, en pourcentage d'utilisation des recettes perçues.
Ouah, t'as vu comme je cause bien et tout ? On croirait presque que je suis une pro de la gestion budgétaire. Alors que que nenni nenni du tout. C'est ma comptable qui a fait tout ça, moi, je sais pas faire. Il parait qu'avec les logiciels de comptabilité associés à nos logiciels de télétransmission c'est easy-les-doigts-dans-l'nez et tout, mais je crois que je fais un rejet. Donc, j'achète ma tranquillité d'esprit en payant quelqu'un qui kiffe faire ce genre de calcul (ça me dépasse, mais y'a des gens que ça branche, je te jure que c'est vrai).
Alors voici pour vous, mesdames-zet-messieurs, un chouette camembert de l'utilisation en pourcentage de mes recettes, avec un beau tableau explicatif et tout, TA DAAAAAH !
Ce qui signifie, au cas où ça ne serait pas encore très clair malgré ce splendide calendos, que sur 100€ d'honoraires que mes patients me versent, je ne garde en moyenne sur ces trois dernières années que 48€ !
Et bien sûr, n'oublie pas que ces 48€ là, ça n'est pas mon salaire net, hein... Non, non, non. Là dessus, je dois mettre de côté pour les congés (toujours sans solde pour nous) et les arrêts maladie (les miens, ceux des enfants...), bref, pour toutes ces journées où je ne peux pas travailler (parce que pas de bras, pas de chocolat, et pas de travail, pas de pépettes !), mais aussi : il faut mettre de côté pour les mois "sans", parce que les revenus ne sont pas réguliers dans le temps. Et c'est logique : en période de vacances scolaires, non seulement il arrive que nous, orthophonistes, on en prenne, des vacances (non mais franchement, quelle idée...), mais même si on n'en prend pas, nos patients, eux, si ! Du coup, ils ne viennent pas. Et pas de bras, pas de chocolat !
Mais aussi, et ça, toi-même tu sais, ouaich, y'a des périodes de l'année où ça fait crac-boum-huuuu, mon pactole tombe à genoux : taxe d'habitation, taxe foncière, avis d'imposition... Tout pareil pour les orthophonistes ! Avec, en plus et à la même période : régularisation URSSAF, 4ème appel de cotisations, voici venu le temps des râles et des "pan !"...
Septembre, novembre, janvier : notre calendrier est jalonné de périodes critiques où nos réserves de sous fondent comme neige au soleil en attendant des jours meilleurs... Alors autant te dire que les mois où on remplit la colonne "recettes", on évite de se la jouer grande classe au palace, non, non, non, on joue plutôt à la petite fourmi même pas drôle avec sa frousse de manquer et son sens de l'économie qui frise la radinerie. Et désolée pour les cigales...
Bon, ceci dit, même si ce diagramme là rend bien compte de la réalité de mon exercice, il n'en reste pas moins qu'il s'agit là de mon camembert à moi, et que, comme le corbeau, je partage pas, na. Parce que si tous les orthophonistes payent des charges sociales, des impôts, un loyer et autres frais impondérables, tout le monde n'a pas les mêmes frais de gestion en fonction de ses choix (équipements, fournitures, formations, frais de gestion...). Il y a donc quand même des variables interpersonnelles qui modifient le montant final des excédents (punaise, c'est beau comme formulation, ça fait pro et tout !).
Mais enfin, comme tu le vois, quand je te dis que à peine la moitié de nos honoraires finit dans notre poche, je ne suis pas si loin du compte...
Sur ce, mesdames-zet-messieurs, je m'en vais aller déprimer un moment, et me changer les idées en tapant quelques uns de mes nombreux comptes-rendus de bilan en retard, joie...
Si tu veux bien, la prochaine fois, je te parlerai de notre système de retraite et d'assurance santé, tiens ! Tu vas voir, c'est hyper funky aussi ! Joie, bonheur et pâtes au beurre !
Et puis tiens, aujourd’hui un confrère a partagé cet article, de quoi nous remonter le moral à fond les ballons, youhouuuuu !
Petite précision... Toi qui es un observateur attentif, tu remarques que, dis donc, en 2012 je "touchais" 56,3% de mes honoraires ! Ben qu'est-ce que c'est que ce truc ?! T'emballe pas, je t'explique...
RépondreSupprimerJe le rabâche assez comme ça : y'a pénurie d'ortho. Donc les établissements censés employer des zorthos, ben y trouvent pas. Donc ils font appel à des zorthos en libéral, et signent une conventions avec eux. Du coup, les zorthos ne touchent pas les sous des patients/de la sécu, mais directement de l'établissement. Et ça, ben, c'est pas comptabilisé pareil dans tes charges sociales et tes taxes professionnelles, même si ce sont quand même des honoraires. Du coup, moins de charges pour les honoraires reçues dans ce cadre là ! Et en 2012, je travaillais sous convention avec pas 2 établissements et 3 SESSAD. Youpi !
Évidemment, c'était trop beau. Quoi, quoi, quoi ? De l'argent qui transite quelque part sans que l'URSSAF touche quoi que ce soit ? Tu penses bien que ça n'allait pas durer ! Effectivement, maintenant, c'est fini : nous sommes taxés AUSSI sur les honoraires perçus directement des établissements dans le cadre de convention de partenariat.
Tralalou, donc...
Voilà, ce point précisé, vous pouvez reprendre une activité normale !
Merciiiiiii pour cette tranche de rigolade objectivo-déprimo-comptable !
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